FR
HT
Taxe sur le Chiffre d'AffairesDe 2008-09 à 2012-2013, Haïti enregistre chaque année une perte de potentielle de pression fiscale de 2%. Des recettes de TCA estimées à 2% du PIB nominal chaque année sont perdues et ne pourront pas être utilisées de manière à financer les équipements collectifs et garantir les conditions sociales de base. LA TAXE SUR LE CHIFFRE D’AFFAIRES (TCA) ET PERTE DE POTENTIELLE DE PRESSION FISCALE : « UNE ANALYSE DE L’EROSION DE TCA ET DE LA PRESSION FISCALE SUR BASE DE TCA POTENTIELLE SUR LA PERIODE DE 2008-2009 A 2012-2013 ». Contexte et Initiative Au sens de l’article I du Décret du 23 novembre 2005, la Taxe sur le chiffre d’affaires (TCA) est une taxe indirecte sur la dépense frappant toutes les opérations se rattachant à la consommation ou à l’utilisation des biens et services en Haïti. Que ce soit celle collectée par l’Administration Générale des Douanes (AGD) pour le compte de la Direction Générale des Impôts (DGI), ou celle collectée par la DGI elle-même, à elle seule, la TCA a représenté en moyenne 30% des recettes sur les dix (10) dernières années, avec respectivement 21% des recettes pour la TCA à l’importation et 9% pour la TCA à l’interne. Compte tenu de ce qu’elle représente dans le dispositif fiscal existant, la Taxe sur le Chiffre d’Affaires mérite d’être étudiée avec minutie. A ce propos, l’analyse de la valeur érodée en termes de TCA peut être très instructive dans le sens qu’elle pourra permettre de mettre l’accent sur une perte de potentielle de pression fiscale à travers les années. Érosion de la Taxe sur le Chiffre d’Affaires à l’interne Au cours de l’exercice fiscal 2008-09, la DGI a récupéré 3714.4 millions de gourdes de TCA à l’interne. Pour ce même exercice, le montant total de la consommation privée était évalué à 293 672 millions de gourdes. Il en a résulté un taux de TCA effectivement récupéré de 1.26% contre un taux statutaire de 10%. Donc, sur la base de ces calculs, seulement 12.6% du potentiel de la TCA à l’interne étaient récupéré. Un montant total estimé à 3 246.4 millions de gourdes de TCA à l’interne était érodé, soit l’équivalent 87.4% du potentiel de TCA à l’interne pour l’exercice. Cette érosion de la taxe ou cette perte de ressources fiscales pour l’État peut être expliquée par une exonération en TCA interne ou par des comportements frauduleux relatifs à la liquidation ou au recouvrement même de la taxe. Tableau #1 Indice d’érosion et valeur érodée de TCA à l’interne de 2008-09 à 2012-13 En millions de gourdes courantes 2008-09 2009-10 2010-11 2011-12 2012-13 TCA interne (A) 3 714.4 3 027.6 4 511.2 3 966.4 4 826.8 Consommation privée (B) 293 672 303 720 313 147 316 352 341 696 Taux effectif (A/B) (%) 1.26 1 1.44 1.25 1.41 Taux statutaire (%) 10 10 10 10 10 Indice de réalisation (%) 12.6 10 14.4 12.5 14.1 Indice d’érosion (%) 87.4 90 85.6 87.5 85.9 Valeur érodée (en millions gdes) 3 246.4 2 724.8 3 861.6 3 470.6 4 146.2 Source : Conception propre, données DGI, AGD, IHSI. En 2009-2010, la consommation privée a augmenté de 3.42%. En dépit du fait que le séisme ait affecté négativement le niveau d’activité économique (-0.9%), les ménages ont fait preuve d’une propension à consommer plus élevée dans la période de crise. Alors qu’on pourrait s’attendre à une thésaurisation1 particulièrement élevée de la part des ménages, laquelle aurait tendance à ralentir le niveau de consommation privée. Pour ce même exercice, la TCA à l’interne a diminué de 18.5% par rapport à l’exercice précédent. Sur la base de la consommation privée totale, seulement 1% de la TCA à l’interne était effectivement réalisée. Tandis que le taux statutaire ou normal est de 10%. Par conséquent, l’indice d’érosion de TCA à l’interne est de 90%. Ce qui correspond a une valeur érodée de 2724.8 millions de gourdes. Par rapport à son potentiel, la Taxe sur le Chiffre d’Affaires telle que collectée par la DGI enregistre une très faible performance. En effet, de 2008-2009 à 2012-2013, l’indice de réalisation moyen au cours de cette période est de 13% environ. Sur la base de ces calculs, 87% de la TCA interne est érodé. Laquelle érosion trouve son explication majoritairement dans des comportements frauduleux relatifs à la liquidation ou au recouvrement même de la taxe puisque l’État n’octroie pas beaucoup d’exonérations en termes de TCA à l’interne. Érosion de la Taxe sur le Chiffre d’Affaires à l’importation En 2008-2009, l’Administration Générale des Douanes (AGD) pour le compte de la DGI a récupéré un montant total de 5 391 millions de gourdes de TCA à l’importation. La valeur en douane totale a été évaluée à 109 235.8 millions de gourdes. Ce qui fait un taux effectif de TCA à l’importation de 5% contre le taux statutaire de 10%. Donc, il en a résulté un indice d’érosion de 50% pour une valeur érodée de 2 730.4 millions de gourdes. Contrairement à la TCA à l’interne pour laquelle il n’est particulièrement pas fréquent de trouver un niveau d’exonérations élevées, pour la TCA à l’importation ces 50% non recouvrés par rapport au potentiel peuvent être majoritairement expliqués par le niveau des exonérations en TCA à l’importation. 1 Dans un souci de disposer de plus d’encaisses réelles pour faire face à un demain incertain. Au niveau de l’exercice 2009-2010, la valeur des importations a augmenté de 44% par rapport à l’exercice antérieur. Cette hausse remarquable du niveau des importations n’était pas sans conséquence sur le niveau de recouvrement de l’AGD en termes de TCA à l’importation. En effet, cette dernière a augmenté de 60%. Rapporté au taux statutaire de 10%, le taux effectif de 7.43% de TCA à l’importation a occasionné un total de 74.3% réalisé par rapport au potentiel de la taxe. Donc au cours de l’exercice 2009-2010, l’indice d’érosion en termes de TCA à l’importation a été de 25.7%. La quasi totalité de ce montant peut être expliquée par les exonérations douanières puisque cet exercice était particulièrement marqué le séisme en vertu duquel la sympathie des étrangers n’était pas des moindres. Les aides affluaient, l’État central a apporté sa contribution en exonérant certains produits en provenance de l’étranger. Tableau #2 Indice d’érosion et valeur érodée de TCA à l’importation de 2008-09 à 2012-13 En millions de gourdes courantes 2008-09 2009-10 2010-11 2011-12 2012-13 TCA à l’importation (A) 5 391 8 644.5 10 178 8 008.4 9 588 Valeur en douane (B) 109 235.8 116 327.7 142 798.7 134 566 148 445.5 Taux effectif (A/B) (%) 5 7.43 7.13 6 6.45 Taux statutaire (%) 10 10 10 10 10 Indice de réalisation (%) 50 74.3 71.3 60 64.5 Indice d’érosion (%) 50 25.7 28.7 40 35.5 Valeur érodée (en millions gdes) 2 730.4 2 220.6 2 923.6 3 242.3 3 403.7 Source : Conception propre, données AGD, IHSI Par rapport à son potentiel, la Taxe sur le Chiffre d’Affaires telle que collectée par l’AGD pour le compte de la DGI enregistre une faible performance contrairement à la TCA à l’interne dont le niveau de performance est absolument faible. En effet, de 2008-09 à 2012-2013, l’indice d’érosion moyen de TCA à l’importation au cours de cette période était de 36% contre 87% pour la TCA à l’interne. De plus, étant donné que l’État octroie plus d’exonérations douanières que fiscales, on peut se rendre à l’évidence que les comportements frauduleux sont nettement plus du côté de la TCA à l’interne que du côté de la TCA à l’importation. Bien que des efforts restent à faire en vue de diminuer l’écart entre le potentiel de la TCA à l’importation et son niveau effectivement réalisé. Perte de potentielle de pression fiscale Au niveau de l’exercice fiscal 2008-09, les recettes totales ont été évaluées à 29881 millions de gourdes. Au cours de ce même exercice, 3 246.4 millions de gourdes et 2 730.4 millions de gourdes ont respectivement été érodés pour la TCA à l’interne et à l’importation. Sur cette base, si l’on recouvrait potentiellement la TCA, le niveau des recettes totales pour l’exercice 2008-09 serait de 35 857.8 millions de gourdes. Rapporté au 266 559 millions de gourdes de PIB nominal, on pourrait avoir un taux de pression fiscal sur base de TCA potentielle de 13% contre le taux de pression fiscal effectivement réalisé de 11% pour l’exercice, soit une perte de potentielle de pression fiscale de 2%. Tableau #3 Perte de potentielle de pression fiscale de 2008-09 à 2012-13 En millions de gourdes courantes 2008-09 2009-10 2010-11 2011-12 2012-13 Recettes totales 29 881.0 31425.0 39 139.4 42 305.5 44 522 Valeur Érodée TCA interne 3 246.4 2 724.8 3 861.6 3 470.6 4 146.2 Valeur Érodée TCA import 2 730.4 2 220.6 2 923.6 3 242.3 3 403.7 Recettes totales sur base de TCA potentielle 35 857.8 36 370.4 45 924.6 49 018.4 52 072 PIB nominal 266 559 264 039 297 687 329 032 366 134 Taux de pression fiscale sur base de TCA potentielle (%) 13 14 15 15 14 Taux de pression fiscale effective (%) 11 12 13 13 12 Perte de potentielle de pression fiscale (%) -2 -2 -2 -2 -2 Source : Conception propre, données MEF La situation en termes de perte de potentielle de pression fiscale liée à l’érosion de la Taxe sur le Chiffre d’Affaires n’a guère changé. Que ce soit l’exercice 2009-2010 caractérisé principalement par le séisme ou même les exercices 2010-2011, 2011-2012 et 2012-2013, on peut remarquer à partir du tableau ci-avant que la perte de potentielle de pression fiscale est de 2%. Les taux de pression fiscale sur base de TCA potentielle au cours des cinq (5) dernières années sont toujours supérieurs de 2 points de pourcentage par rapport aux taux de pression fiscale effectivement réalisés au cours de ces dites années. Conclusion et recommandations Le niveau de performance de la Taxe sur le Chiffre d’Affaires telle que collectée par la DGI à l’interne est très faible. Puisque par rapport à son potentiel, seulement 13 % est effectivement réalisé pour un indice d’érosion de 87%. Tandis que pour la partie collectée par l’AGD pour le compte de la DGI, 36% est érodée. Entre autres, ces valeurs érodées en termes de TCA, ont causé une perte de potentielle de pression fiscale de 2% par année au cours de 2008-09 à 2012- 13. Etant donné ces pertes de ressources qui vont se traduire ensuite en perte de potentielle de pression fiscale, ce sont des équipements collectifs qui ne pourront pas être financés par l’Etat malgré son souci de garantir les conditions sociales de base et de réduire considérablement la pauvreté. On recommande alors aux autorités fiscales et douanières compétentes de : Réduire les exonérations de TCA qui constituent une fraude légale ; Eliminer les liquidations sur la base nette car elle peut être source de fraude ; Eliminer certains frais déductibles puisque les contribuables ont tendance à majorer les déductibilités de manière à diminuer l’impôt dû ; Mettre en place un système de contrôle fiscal appuyé par un système de répression crédible ; Créer une police des impôts et dont les prérogatives seront définies de manière à traquer les fraudeurs ; Faire appliquer les articles 23 à 28 du Décret du 23 novembre 2005 relatif à la TCA. Rubrique: Economie Auteur: ERNEST DORILAS | Date: 16 Avril 2014 |
|
|