TB/PVVIH Entre stigmatisation, discrimination et quête de santéde Pierre Bernadin Jean Laurent| JobPaw.com

TB/PVVIH Entre stigmatisation, discrimination et quête de santé


Maladi zepol kare, maladi ti kay, maladi touse ou maladi pwatrinè sont les différentes appellations utilisées pour qualifier le patient atteint de tuberculose. Marginalisés et frustrés assez souvent, certains patients ne savent que faire et à qui se fier. Une telle situation constitue un obstacle crucial à leur prise en charge médicale, selon des experts dans le domaine.


« Suite à mon diagnostic positif, je me sentais gêné par rapport à la manière dont les gens que je côtoyais me regardent fréquemment», a révélé un ancien tuberculeux, dont le visage est éveillé et le corps bien proportionné.

Il a également souligné l'hypocrisie et l'indifférence de ces voisins, lorsqu'il toussait assez souvent. Sans tenir compte de leurs perceptions erronées au sujet de la tuberculose.

« Pour me rendre quelque part ou chez le médecin, a-t-il poursuivi, je le faisais avec peine tout en me disant que leurs méfiances à mon égard prendront peut-être des degrés divers. Heureusement je suis guéri de la tuberculose depuis cinq ans déjà », s'est-il réjoui, signalant d'une part, la miséricorde et la bonté de Dieu à l'endroit de toutes les créatures, particulièrement lui-même.

D'autre part, il n'a pas oublié de faire l'éloge de la médecine, rappelant les nombreux exploits et recherches avancées des médecins.

Quant à ce patient, timide et sournois, « moi, j'ai honte, je ne désire pas sortir pour que l'on ne me voit », a-t-il dit l'air sournois.

Pour ce patient, et d'autres tuberculeux de l'hôpital Sanatorium, le mot stigmatisation ne figure pas dans leur vocabulaire. Quand on leur explique ce que c'est, ils prennent un ton hostile pour faire remarquer que la tuberculose ne tombe pas sur des arbres mais sur des hommes. Selon, n'importe qui peut être infecté par la maladie.

« Je ne sais pas ce que c'est la stigmatisation et je n'ai jamais entendu parler de ce mot là », ont-ils dit à tour de rôle, ajoutant qu'ils craignent les bavardages des gens au sujet de la tuberculose.

En ce qui concerne les prisonniers atteints de tuberculose et de VIH/SIDA, des cas de stigmatisation et de discrimination sont visibles dans les prisons haïtiennes, selon le livret de Panos Caraïbes. Le prisonnier tuberculeux est acculé par ses pairs que des responsables de la prison qui essaient du mieux de l'amoindrir. « Les agents pénitentiaires sont toujours prêts à pointer du doigt les détenus infectés. Quand la maladie est déclarée, le malade est mis à l'écart sans avoir à bénéficier de soins appropriés. Souvent, il leur arrive d'être stigmatisés par les co-détenus et par les Agents de l'Administration Pénitentiaires », a expliqué un enquêteur de l'Office du Protecteur du Citoyen.

Cet enquêteur a aussi relaté que des détenus homosexuels ne sont nullement tolérés sous prétexte qu'ils sont les propagateurs de MST/VIH/SIDA.

« Il y a eu un gason makomè dans ma cellule, on le payait pour faire la lessive. Cependant, nous avons dû le chasser de peur qu'il ne vienne reproduire ses mauvaises pratiques », a fait savoir John, signalant par ailleurs qu'un tel comportement ne leur garantit pas la sécurité dans leur quête de santé et de bien-être. Puis, il a dit que, le refus de s'informer de leur statut sérologique est souvent l'une des dispositions personnelles de protection adoptées.

Selon la directrice du Sanatorium, Dr Joseline Dorlette, la stigmatisation continue d'être un obstacle majeur à la prise en charge médicale des détenus et traduit un besoin élevé de prévention dans le milieu carcéral haïtien, lit-on dans le livret de Panos. En guise de précision, l'institut Panos a révélé à travers ce livret que la majorité des prisonniers tuberculeux référés au Sanatorium de Carrefour-Feuilles, seraient des hommes.

A quel degré les patients stigmatisés ont-ils été atteints ?

« Des tuberculeux ont été atteints à des degrés divers : de la méfiance à la critique, de l'ostracisme à la discrimination, du rejet à l'abandon », a répondu un professeur d'anthropologie médicale.

Il a mentionné par ailleurs que l'existence d'attitudes hostiles envers les personnes atteintes, nourries par des connotations péjoratives de la maladie, semble être un invariant culturel. Cette maladie sociale, poursuit-il, est souvent pour les personnes atteintes et pour leurs proches, plus difficile à vivre que les manifestations cliniques de l'atteinte par le virus.

« Même les personnes n'ayant aucune relation véritable avec la maladie sont couramment montrées du doigt du fait de leur appartenance à un groupe général est associée au VIH/SIDA », a renchéri un travailleur de santé, expliquant des cas cliniques, tels que les patients qui cachent leurs diagnostics à leurs amis et même à leur famille, pour éviter les bavardages.

Dans le cadre de la prise en charge des PVVIH, Me Renan Hédouville a suggéré qu'il faudrait apporter à court terme, un appui psychologique aux détenus infectés, puis, sensibiliser l'opinion nationale à la problématique du VIH/SIDA dans le milieu carcéral haïtien. Ce, pour la promotion des droits humains de chacun.

Jean Laurent Pierre Bernadin
bernyjl11@yahoo.fr
Panos Caraïbes/écrit et publié au quatidien LeNouvelliste le 29 juin 2009

Rubrique: Divers
Auteur: Pierre Bernadin Jean Laurent | bernyjl11@yahoo.fr
Date: 16 Nov 2010
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